J'ai longtemps habité en région. «En campagne», comme disent les Montréalais, peuplade hétéroclite si elle en est une et dont je fais maintenant joyeusement partie.

J'ai choisi le quartier Mile End pour ses qualités culturelles et sa proximité de la montagne, qui me rappelle mon patelin d'enfance. Comme à Sainte-Adèle, sa croix illuminée berce mes nuits d'insomnies en veillant sur moi, sur mes voisins, amis et chers concitoyens.

:)

Le Mile End c'est un quartier qui est collé sur Outremont. Par conséquent, beaucoup d'entre ces «chers concitoyens» sont des Juifs hassidiques. Là encore, je me sens chez moi. La ville voisine de Sainte-Adèle, Val-Morin, accueille une grande communauté juive hassidique elle aussi.

Le voisinage ne se passe pas toujours bien. Ça je l'avoue. Je trouve ça dommage. C'est vrai que, bien que nos deux religions puisent leurs origines à la même source, un monde désormais nous séparent, juifs et cathos.

Ou bien... Peut-être pas tant que ça?

Le 10 mars dernier, j'avais rendez-vous chez l'oculiste, rue Laurier. Je sors de chez moi et je descends la rue Hutchison, juste à côté, dedans Outremont. Bien que j'emprunte souvent cette petite artère tranquille, il se passait cette journée-là quelque chose de très, très étrange :

les Hassidims avaient
carrément pété un plomb.

Ou bien... Peut-être pas tant que ça?

Curieusement, cette journée-là, ils n'étaient pas vêtu de noir, non. Ayant troqué le schtreimel contre la perruque de clown et le talit contre le pantalon à pois rose, certains gamins y allaient à fond la caisse avec des chapeaux de cow-boys et des casquettes de policiers courant partout de maison en maison comme un 31 octobre au Québec. C'est en constatant, non sans sourire franchement, qu'un Lucky Luke portait ses péots virevoltant au vent de chaque coté de son visage que je me suis dit, que 1. soit mes voisins hassims étaiens tous devenus fous en même temps la veille, ou 2. soit que quelque chose m'échappait.

Je me suis donc arrêtée devant une dame juive (elles ne semblaient pas prendre part à la mascarade, mais elles avaient l'air fort satisfaites de ces inhabituelles extravagances) pour lui demander ce qui leur prenait tout-à-coup.

- Sorry to bother, but may I ask you what is going on ?
- Yes! For us, it's Purim today!
- Purim? Well... I think it's a lovely feast! Thank you, madame.
- That's nothing.

Et pis j'ai continué ma route, me frayant un chemin entre Holly Hobby, Spiderman et la fée Clochette.

En revenant à la maison, j'ai fait une recherche sur Internet et j'ai trouvé des trucs sympas. On m'avait souvent dit de ne pas me fier à l'eau qui dort et que, concernant les hassidims, il fallait pas croire que ces mecs-là ne savent pas faire la fête comme des cons aussi. Comme nous. Enfin... Comme pas mal tout le monde de ce petit village qu'on appelle la Terre. On est humains. C'est le mois de mars et on en a marre de l'hiver. Qu'on l'appelle Pourim ou Mardi Gras, pour moi c'est kif-kif.

Vous croyez pas qu'on est tous pareils? Pft. La preuve, c'est que pour les loups, les charognards, les hyènes, ou Godzilla, beh, on goûte tous la même chose.